Les ONG du secteur de la santé alertent sur la détérioration de l’accès aux soins

Les ONGs qui interviennent dans le domaine de la santé en Haïti disent observer une détérioration de l’accès aux soins de santé de base pendant la période du nouveau coronavirus. Les femmes et les enfants en paient particulièrement lourdement le prix, a expliqué la pédiatre Sabine Lustin, en entretien avec le journal le mercredi 22 juillet. Le cadre de liaison inter- ONG (CLIO) interpelle pour ne pas avoir à gérer d’autres catastrophes sanitaires après la Covid-19.

Le cadre de liaison inter-organisations (CLIO) qualifie de « dramatiques » les conséquences de la détérioration du système sanitaire. Les rapports journaliers et mensuels des membres du CLIO ont fait état d’une augmentation du nombre de cas de malnutrition, une diminution du taux de vaccination et plusieurs cas de femmes enceintes qui avaient une grossesse à risque qui n’ont pas pu bénéficier d’une attention médicale à l’accouchement.  « Nous observons des cas de décès communautaires, notamment de femmes enceintes n’ayant pu trouver de structures sanitaires pour les accueillir, tandis que d’autres femmes enceintes décèdent dans des maternités faute de personnel médical, de matériel ou de médicaments disponibles », a alerté le CLIO dans un communiqué.

« Nous notons également une forte diminution, si ce n’est une suspension totale dans certaines zones, des activités communautaires essentielles pour la santé infantile comme la vaccination ou le dépistage et le suivi des cas de malnutrition », a ajouté le CLIO, qui dit craindre que cette situation ne provoque une résurgence d’épidémies telles que la rougeole ou la diphtérie. D’autre part, certaines ONG rapportent une augmentation des cas de malnutrition dans leurs zones d’intervention. A cause de la diminution des services de planification familiale, elles présagent un nombre croissant de grossesses non désirées dans les mois à venir.

Pour le Dr Sabine Lustin, si l’on ne veut pas avoir sous les bras d’autres épidémies à gérer après la Covid-19, il faut continuer à maintenir les soins de base de santé au niveau du pays. Il y va de la responsabilité des autorités sanitaires, des institutions œuvrant dans la santé et de la société civile. « Le gouvernement, les autorités sanitaires, les bailleurs… tout le monde met l’emphase sur la Covid, mais il ne faut pas oublier qu’à côté de la Covid, il y a les autres maladies », a-t-elle déclaré. La réponse à l’épidémie de Covid-19 ne doit pas reléguer au second plan les autres besoins sanitaires urgents, particulièrement la prise en charge de la malnutrition, la vaccination de routine, la santé sexuelle et reproductive et la santé infantile.

Selon les ONG, la Covid-19 a amplifié et aggravé les difficultés d’accès aux soins déjà présentes : des structures de santé ont fermé leurs portes parce que le personnel ne pouvait y travailler faute de matériel de protection, ou avait été mis en quarantaine suite à la détection d’un cas de Covid-19 parmi le personnel ou les patients. Parmi ces structures figurent les deux principaux hôpitaux universitaires de la capitale qui ont fermé plusieurs de leurs services au cours des mois de mai et de juin. D’autres structures ont adopté des horaires d’ouverture réduits ne permettant pas de recevoir le même volume de patients ou ont cessé de fournir certains services tels que la vaccination, la planification familiale ou les consultations prénatales.

Les responsables des ONG lancent un appel aux autorités et aux partenaires financiers pour que la priorité soit donnée au renforcement de l’accès aux soins de base dans tout le pays. « Il est nécessaire de répondre à la fois aux sévères difficultés d’accès aux soins des populations les plus vulnérables en Haïti, et au besoin de protéger le personnel de santé, en tenant compte de leur plus grand risque d’exposition à la maladie et de l’impact que cela peut avoir sur le maintien des services de santé », ont-ils avancé, saluant au passage l’annonce de l‘augmentation de l’enveloppe du budget de l’Etat consacrée à la santé.

Source: Le Nouvelliste